12 novembre 2021

Lorsque l’industrie du numérique pollue notre planète et notre santé

Au moment où se tient la COP26 à Glasgow sur le réchauffement climatique, ses dangers et les moyens de le ralentir, le Monde Diplomatique d’octobre 2021 publie un article édifiant sous la plume de Guillaume Pitron, juriste et journaliste spécialisé sur le retentissement environnemental des nouvelles technologies.

Quand un lobby patronal à Bruxelles (le GeSI) soutient que ‘’ les émissions évitées via l’utilisation des technologies de l’information et de la communication sont 10 fois plus importantes que celles générées par le déploiement de ces technologies’’, de nombreux chercheurs indépendants contestent la véracité et la sincérité de ces chiffres.

L’empreinte des technologies digitales sur l’environnement se marque à tous les niveaux.

  • Celui de la fabrication:

Prix de la matière première, en particulier des métaux rares, prix de la transformation, du stockage, du transport.

Un ordinateur de 2 Kgs mobilise, outre les métaux rares difficiles à extraire du sous-sol, 22Kgs de produits chimiques, 240Kg de combustible (souvent du charbon), 1.5 tonne d’eau claire. (Etude WeGreen IT 2018).

  • Celui du fonctionnement:

Les technologies digitales mobilisent aujourd’hui 10% de l’électricité produite dans le monde et rejetteraient près de 4% des émissions globales de CO2 (The Shift Project, Oct 2018). Les données sont produites à chaque instant, transportées, stockées, traitées et tout cela en consommant des ressources et de l’énergie.

  • Le problème des Centres de Données (Data Centers) :

De plus en plus nombreux, de plus en plus grands, ils entrainent une consommation d’eau et d’électricité de plus en plus importante, ne serait-ce que pour refroidir les machines.

De plus, pour des raisons de sécurité, pour éviter une panne, ils sont dupliqués voire multipliés, dans des régions, des pays différents.

Souvent, ils sont de plus sur-dimensionnés afin de prévoir une extension future.

  • Le problème de l’automatisation, de la robotisation de l’activité en ligne, qui se développent en particulier dans la finance, mais aussi, bientôt, dans la connectique (maisons connectées, voitures ‘’intelligentes’’).
  • Enfin, le problème des déchets et de la pollution qu’ils peuvent entrainer:  la consommation de matières reflète son empreinte énergétique d’une part et soulève, pour les équipements individuels en particulier, la question de la recyclabilité. Le taux de recyclage global d’un smartphone est de 18 % en France (INSEE 2019) à confronter à la composition et la quantité de matière nécessaire à sa fabrication.

Selon Thomas O’Neil, les fonds d’investissement ‘’passifs’’, les plus robotisés, gérés par BlackRock en 2018, avaient enregistré une ‘’intensité charbon’’ de plus de 650 tonnes par million de dollars alors que les fonds actifs, moins souvent pilotés par des machines, font état d’une intensité de l’ordre de 300 tonnes par million de dollars.

Ainsi le développement ‘’ tout azimut ‘’ du numérique risque de nous apporter dans l’avenir, outre ses bienfaits, beaucoup de désillusions.

Il semble donc fondamental de rester vigilant et de ne pas céder aux sirènes de ceux qui nous promettent que le développement du numérique nous apportera la résolution de tous nos problèmes, y compris de ceux qui n’en sont pas.

Jean Lefèvre, cardiologue, porte-parole de l’ASEF.