Les brèves de l'ASEF- 01 octobre 2021

Bonjour à toutes et à tous,

Programme dense et riche pour ces nouvelles brèves : une étude du Dr Lisik sur les conseils donnés aux femmes enceintes ou en désir de grossesse ; les nouvelles valeurs cibles de l’OMS concernant la pollution de l’air ; focus sur le lien entre le bruit et la démence. Et enfin, les multiples appels de scientifiques concernant la santé planétaire.

Bonne lecture,
Prenez bien soin de vous et de vos proches.


Etude Dr François Lisik – Conseils donnés aux femmes enceintes ou en désir de grossesse

 

Le Docteur François Lisik, gynécologue obstétricien, membre de l’ASEF, a lancé une étude, soutenue par le groupe Elsan, chez les femmes enceintes ou en désir de grossesse pour évaluer l’efficacité d’un protocole de conseils sur la réduction d’exposition aux éléments traces métalliques (métaux).

La période pré conceptionnelle et la grossesse sont des périodes clés, dites « sensibles » pour le devenir sanitaire de l’enfant. Le transfert trans placentaire des polluants nécessite que la maman ou future maman se protège en particulier des contaminants chimiques.

Cette connaissance des polluants environnementaux est actuellement trop peu abordée dans la relation médecin patient ce qui fait de ce protocole une étude novatrice.
Il est basé sur un dosage capillaire des polluants sur une mèche de cheveux de 3 cm (équivalent à 3 mois d’exposition).

Selon les résultats initiaux, le médecin repère les femmes ayant un ou des niveaux d’exposition classé « à risque ». Il prodigue alors des conseils comportementaux personnalisés pour tenter de supprimer la source des polluants identifiés. Un nouveau prélèvement capillaire sera effectué au moins 4 mois après pour juger de l’efficacité de ce protocole de conseil.

Le Dr Lisik utilise notamment comme outils de conseils les éléments du guide « comment protéger ses patients de la contamination chimique et des perturbateurs endocriniens » de l’URPS ML PACA réalisé avec l’ASEF et remet des documents issus de ce guide.

L’intérêt de cette étude est de valider, par des prélèvements sur une matrice biologique, l’efficacité des conseils environnementaux sur la contamination chimique en introduisant ce lien santé environnement dans la consultation.
Elle permettra aussi d’évaluer la satisfaction des patientes sur une telle approche de santé environnementale, insuffisamment abordée actuellement dans la relation médecin patient.

Pierre Souvet, président de l’ASEF, cardiologue

Pollution de l’air : pourquoi l’OMS change ses valeurs cibles

 

L’OMS a adopté le 22 septembre de nouvelles lignes directrices concernant la pollution de l’air.

Elles passent de 10µg/m3 à 5µg/m3 en moyenne annuelle pour les particules PM2.5; et pour le dioxyde d’azote, essentiellement dû au trafic en milieu urbain et particulièrement le diesel, on passe de 40µg/m3 à 10µg/m3.

Pour mesurer notre « retard » dans la prise en compte de ce problème majeur de santé publique, on rappelle que les normes françaises de PM2.5 sont de 25µg/m3 alors que les normes américaines sont à 12µg/m3 depuis 2012.

Pourquoi ces valeurs? Une étude de POPE III en 2019 concernant plus de 1.6 millions d’américains de la National Health Interview Survey suggérait qu’il y avait peu d’association entre mortalité toute cause et taux de PM2.5 en dessous de 5µg/m3. [1]

De plus, la sortie début septembre 2021 dans le British Médical Journal de l’étude européenne ELAPSE sur de 325 367 personnes, avec un recrutement notamment dans des zones dites peu polluées, montrait une augmentation de 13 % des décès par augmentation des PM2.5 de 5 µg/m3 et de 8.6% des décès par augmentation de 10µg/m3 de dioxyde d’azote. [2]

« Cette étude confirme que la pollution de l’air extérieur est associée à la mortalité même à de faibles niveaux de pollution inférieurs aux normes européennes et nord-américaines actuelles et aux valeurs guides de l’OMS. » [2]

L’OMS a donc logiquement modifié ses valeurs cibles en attendant de s’intéresser comme il est souhaitable aux particules PM1 et Ultra Fines (PUF).

Pierre Souvet, président de l’ASEF, cardiologue.

Bruit et démence

Un rapport de l’ADEME [3] de juillet 2021 estime à 155,7 milliards par an le cout social du bruit !

Les effets sanitaires induits par le bruit sont nombreux: troubles du sommeil et de la santé mentale, difficultés de concentration et retard d’apprentissage, risques pour l’audition et risques cardiovasculaires accrus, HTA, AVC, cardiopathie ischémique (l’étude de HUSS en 2010 estimait le risque de mortalité par infarctus de 30% entre une exposition >60dB et <45dB)…

« Le cerveau s’en mêle »

Le British medical journal a publié une étude de cohorte nationale au Danemark portant sur l’exposition résidentielle au bruit des transports et incidence de la démence. [4]

Cette étude portant sur près de 2 millions de personnes a recensé entre 2004 et 2017, 103 500 démences toutes causes (Alzheimer, démence vasculaire, démence liée à la maladie de Parkinson).

L’exposition moyenne sur 10 ans au bruit du trafic routier et ferroviaire a montré que les occupants des façades exposées des bâtiments étaient associés à un risque plus élevé de démence toutes causes confondues.

Ce risque était proportionnel à l’intensité du bruit puis plafonnait pour des expositions au bruit très élevé. 

Pour la route, l’augmentation du risque était de 27% en cas d’exposition à plus ≥55 dB Lden par rapport à <40 dB Lden,

Et pour la voie ferrée, de 24% si l’exposition est supérieure ou égale à 50 dB Lden par rapport à une exposition inférieure à 40 dB Lden.

Explications sur L’INDICATEUR LDEN

A niveau équivalent, le même bruit sera perçu plus gênant la nuit que le jour. Il a donc été décidé de créer un indicateur global harmonisé à l’échelle européenne tenant compte de cette différence de perception : le Lden. Cet indicateur est calculé sur la base des niveaux équivalents sur les trois périodes de base : jour, soirée et nuit, auxquels sont appliqués des termes correctifs majorants, prenant en compte un critère de sensibilité accrue en fonction de la période. Ainsi, on ajoute 5 dB(A) en soirée et 10 dB(A) la nuit.

Explication sur dBA : c’est l’intensité du bruit perçu:

+10 dB : le bruit sera perçu deux fois plus fort.

+20dB : le bruit sera perçu 4 fois plus fort

+50 dB : le bruit sera perçu 30 fois plus fort

Ces résultats étaient robustes à l’ajustement pour la pollution de l’air, (qui est aussi un facteur de risque de démence), indiquant ainsi un effet indépendant du bruit sur les mécanismes biologiques conduisant à la démence.

L’étude de Jafari et al chez l’animal sur les mécanismes entre bruit estime que l’exposition chronique au bruit dérègle le système neuroendocrinien, entraînant une hyperactivation des divisions sympathiques du système nerveux autonome (c’est-à-dire l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA)) et augmente les hormones de stress. L’exposition à long terme aux glucocorticoïdes pouvant endommager le cerveau. [5]

Le bruit des transports est considéré comme le deuxième facteur de risque environnemental pour la santé publique en Europe, dépassé seulement par la pollution de l’air.  Environ 20 % de la population européenne est exposée au bruit des transports au-dessus des niveaux recommandés de 55 dB. 

NB : le contrôle technique des 2 roues est déjà présent dans un grand nombre de pays européens : il me parait utile pour la sécurité des motards. De plus, un échappement trafiqué, source de bruit, sera alors détecté et rectifié, beaucoup plus facilement que de traquer les contrevenants sur la route. Malheureusement son introduction a été « suspendue ».

Pierre Souvet, président de l’ASEF, cardiologue.

L’appel commun des revues scientifiques face à l’urgence de la crise environnementale

 

Le 6 septembre, juste avant l’ouverture de l’assemblée générale des Nations Unies, plus de 200 revues scientifiques, dont les plus prestigieuses (British Medical Journal, le Lancet, le Journal of the American Medical Association (JAMA), le New England Journal of Medicine) ont mis de côté leurs rivalités pour lancer un appel commun aux dirigeants du monde entier leur demandant de prendre les mesures nécessaires pour remédier à une situation qualifiée de « crise environnementale généralisée ». L’effondrement de la biodiversité et le réchauffement climatique étant pour elles les plus grandes menaces pour la santé. « Des changements urgents doivent être apportés à l’échelle des sociétés et conduiront à un monde plus juste et plus sain ».

D’ailleurs, la tribune parue cette semaine dans Reporterre, de l’Alliance Santé planétaire avec qui nous collaborons, « Soigner le vivant, c’est soigner notre santé », rejoint cet appel. « Prendre soin du vivant dans sa globalité est aujourd’hui l’approche juste et nécessaire pour améliorer la santé humaine ».

L’étude Mistral (lien entre pollens, pollution et allergies saisonnières) cherche des bénévoles

 

Cette étude à laquelle participe AtmoSud, vient de commencer et durera une année, sur le territoire de l’Etang de Berre, Marseille et Aix-en-Provence. Elle consiste à analyser les symptômes allergiques déclarés par les citoyens, ainsi que leur exposition à la pollution atmosphérique et aux pollens.

Elle s’adresse à des personnes :

  • Résidant sur le territoire PACA
  • Majeures
  • Souffrant d’allergies aux pollens
  • Disposant d’une adresse mail valide, d’un numéro de téléphone mobile et d’une connexion internet.

Si vous voulez en savoir plus ou participer à cette étude, c’est très simple : rendez-vous sur le site www.MASK-PACA.com.

AGENDA

 

Le 2 octobre, Pierre Souvet interviendra à 11h au Festival du livre de Mouans Sartoux : « Perturbateurs endocriniens, il est temps d’agir ». Retrouvez le programme complet

Le 3 octobre, Jean Lefèvre, porte-parole de l’ASEF, et Pierre Souvet interviendront à une conférence de l’hôpital Saint Joseph (Marseille) sur la pollution de l’air et les maladies cardio-vasculaires.

Le 4 octobre, Dr Pierre Souvet sera auditionné par le Haut Conseil de Santé Publique sur l’évaluation des PNSE.

Le 11 octobre, Jeunes Médecins et l’Alliance Santé Planétaire s’associent avec l’ASEF pour la création de vidéos sur les différentes thématiques de santé environnementale. Si vous avez des sujets que vous aimeriez voir aborder, n’hésitez pas à nous envoyer vos propositions.

Le 13 octobre, à l’occasion de la journée de la qualité de l’air, l’ASEF interviendra à la conférence de presse, au ballon Generali, l’un de nos soutiens.

Le 14 octobre, Pierre Souvet interviendra lors du webinaire organisé par le réseau ÎSEE sur la qualité de l’air intérieur dans les écoles. Accessible à tous sur inscription

Le 15 octobre, l’ASEF interviendra lors des 14èmes RENCONTRES : « SANTÉ RESPIRATOIRE : QUELS IMPACTS DE L’ENVIRONNEMENT ? » de l’association Santé Respiratoire FrancePlus d’informations et inscription

Le 29 novembre, Martine Vergnol, consultante en lactation certifiée ILBCLC et membre de l’ASEF, animera une formation « polluants et lait maternel ». Celle-ci est prévue en présentiel à Paris, mais il est aussi possible de la suivre à distance le jour J. Plus d’informations et inscription 

SOURCES

[1] C. Arden Pope III,Jacob S. Lefler,Majid Ezzati, et al., 2019, Mortality Risk and Fine Particulate Air Pollution in a Large, Representative Cohort of U.S. Adults, Environmental Health Perspectives 127:7 CID: 077007 https://doi.org/10.1289/EHP4438 

[2] Strak M, Weinmayr G, Rodopoulou S, et al. Long term exposure to low level air pollution and mortality in eight European cohorts within the ELAPSE project: pooled analysis , BMJ 2021; 374 :n1904 doi:10.1136/bmj.n1904, https://www.bmj.com/content/374/bmj.n1904

[3]https://presse.ademe.fr/2021/07/156-milliards-deuros-cest-le-cout-social-du-bruit-en-france-par-an.html

[4] Cantuaria M L, Waldorff F B, Wermuth L, et al. Residential exposure to transportation noise in Denmark and incidence of dementia: national cohort study,  BMJ 2021; 374 :n1954 doi:10.1136/bmj.n1954 ; https://www.bmj.com/content/374/bmj.n1954

[5] Jafari Z, Kolb BE, Mohajerani MH. Noise exposure accelerates the risk of cognitive impairment and Alzheimer’s disease: Adulthood, gestational, and prenatal mechanistic evidence from animal studies. Neurosci Biobehav Rev. 2020 Oct;117:110-128. doi: 10.1016/j.neubiorev.2019.04.001. Epub 2019 Apr 9. PMID: 30978359. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30978359/