La santé environnementale par les pharmaciens

Les questions sur notre santé en lien avec notre environnement préoccupe de plus en plus le grand public. Certains chiffres sont alarmants :

•  Le cancer du sein est le plus fréquent dans le monde, avec en tête de liste la France, à la première place depuis 2022. [1].
• Les allergies respiratoires touchent aujourd’hui un français sur 4. EN cause, le changement climatique, les pollutions, le mode de vie [2].
• Le diabète type 1 est de plus en plus fréquent et précoce chez les enfants. Le diabète de type II représente désormais 10 % des cas de diabète chez les enfants et adolescents [3].
• En France, l’exposition chronique aux particules fines PM 2,5 cause 40 000 décès par an, et réduit de 8 mois l’espérance de vie des personnes de 30 ans et plus [4].

Les pharmaciens peuvent apporter des réponses pour atténuer les effets des bouleversements environnementaux. Leur accessibilité et la confiance du public leur permet de faire passer de nombreux messages. Ils peuvent également agir sur leurs pratiques professionnelles. Les bénéfices seront écologiques, mais aussi économiques.

3 axes principaux sont à considérer :

1. Faire de la prévention

• L’information du public sur les facteurs de risque et sur les moyens de les atténuer.
• Informer sur certains polluants comme les perturbateurs endocriniens
• Renseigner les jeunes et futurs parents pour protéger leur enfant des contaminants de l’environnement
• Afficher la pollution atmosphérique et la carte des pollens, conseiller les personnes allergiques ou ayant des pathologies respiratoires, cardiovasculaires en cas de pollution.
• Alerter sur les méfaits de l’alimentation ultratransformée …

Cela peut se décliner sous forme d’information générale, par des affiches, des flyers, ou encore des vidéos, ou sous forme de conseils personnalisés auprès des personnes atteintes de pathologies.

• La vaccination et le dépistage, comme pour le diabète par exemple.

2. Choisir ses produits

Le secteur médical représente 8% des émissions de gaz à effet de serre en France, dont la moitié est due aux médicament et dispositifs médicaux [5]. Pour diminuer cet impact, l’officine pourra identifier les médicaments et dispositifs médicaux les plus vertueux grâce à la mise en place d’un carbone-score [6]. D’autres indices existent déjà, sur l’empreinte environnementale des molécules, comme le Hazard Score. Ces outils doivent être développés plus largement pour être utilisables en routine par les professionnels de santé.

En parapharmacie :

• Proposer a minima un gamme certifiée Bio (Ecocert, Cosmebio…) pour les femmes enceintes et les enfants. Et si possible pour l’ensemble de la clientèle.
• Toujours avoir à disposition des biberons en verre, à conseiller en premier.
• Privilégier les produits peu emballés, d’origine aussi locale que possible.
• Communiquer largement sur le retour des médicaments non utilisés à l’officine

3. Agir sur l’officine

L’officine est elle-même source d’impacts environnementaux, ce qui est inévitable. Elle peut s’engager à les réduire :

• En faisant l’inventaire de ces impacts :
• Consommation d’eau, d’électricité, transports, quantité de déchets produits …
• En agissant pour les réduire. Par exemple :
• Installer un système de tri des déchets
• Régler la climatisation et le chauffage
• Passer à une seule commande par jour
• Mutualiser les transports des salariés …

Pour garantir la réussite de ces changements, il est nécessaire d’embarquer l’équipe dans l’aventure. Cela demande de sensibiliser les salariés, et de les responsabiliser en leur attribuant une mission, pour les volontaires. L’engagement environnemental soude les équipes et rajoute du sens à leur métier.

Il est préférable de commencer par des actions simples et ayant un impact fort, comme la diminution des impressions papier. Après leur consolidation, l’officine doit s’engager sur des mesures plus profondes, comme repenser la fréquence des livraisons.

Communiquer avec les autres professionnels de santé permet d’étendre la portée de ces changements.  Les pharmaciens peuvent informer les prescripteurs pour réduire l’impact des ordonnances, en préconisant l’usage d’inhalateurs à poudre plutôt que des dispositifs à gaz propulseur par exemple [7]. Il existe bien d’autres leviers pour réduire nos impacts sur l’environnement sans préjudice pour les patients.

Virginie Cavier

Docteure en pharmacie, écotoxicologue, Auteure de Officine et environnement : comprendre, agir et conseiller.

[1] International Agency of Research on Cancer (2022). Cancer Today (base de données).

[2] République Française (2019). Allergies respiratoires : les données 2018. Vie Publique. Disponible sur https://www.vie-publique.fr/en-bref/21966-allergies-respiratoires-les-donnees-2018

[3] Ameli (2023). Comprendre le diabète de type I. disponible sur  https://www.ameli.fr/hauts-de-seine/assure/sante/themes/diabete-type-1-enfant-adolescent/comprendre-diabete-enfant-adolescent

[4] Santé Publique France (2021).  Pollution de l’air : l’OMS révise ses seuils de référence pour les principaux polluants atmosphériques. Disponible sur : https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2021/pollution-de-l-air-l-oms-revise-ses-seuils-de-reference-pour-les-principaux-polluants-atmospheriques

[5] The Shift Project (2023). Décarboner la santé pour soigner durablement. 19p. Disponible sur  https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2023/04/180423-TSP-PTEF-Synthese-Sante_v2.pdf

[6] Mise en place d’une méthodologie d’évaluation de l’empreinte carbone des médicaments, Ministère du travail, de la santé, des solidarités, des familles de l’autonomie et des personnes handicapées, 05/02/2025.    https://sante.gouv.fr/actualites-presse/presse/communiques-de-presse/article/mise-en-place-d-une-methodologie-d-evaluation-de-l-empreinte-carbone-des

[7] Leraut J., Boissinot L., Y. Hassani Y., Bonnet-Zamponi D., Le Gonidec P. (2023) Réduire l’impact environnemental des inhalateurs dispensés en ville et à l’hôpital en France. Du diagnostic à l’action durable. Annales Pharmaceutiques Françaises. Vol. 81, n°1, 2023, 123-137.