15 février 2018

Les Polluants Organiques Persistants - la synthèse de l'ASEF

Comprendre ce qu’est un P.O.P.

Définition

Les Polluants Organiques Persistants (ou P.O.P.), sont des substances organiques qui sont capables de résister à la dégradation biologique, chimique et photolytique (décomposition chimique par la lumière) dans l’environnement. Les P.O.P. sont persistants dans le temps dans l’environnement ; ils se bioaccumulent (sont assimilés) dans les tissus vivants, sont mobiles (se déplacent sur de très longues distances) et se bioamplifient (augmentation des concentrations d’une substance dans les maillons de la chaîne alimentaire). Ils peuvent être produits de manière intentionnelle (industrie du pesticide par exemple) ou non-intentionnelle (par la combustion de biomasse et l’incinération de déchets par exemple). Les P.O.P. peuvent avoir des effets nocifs sur les êtres vivants (cancers, malformations, dérèglement des systèmes immunitaires et reproductifs, réduction des capacités intellectuelles…).

Les règlementations pour la limitation des rejets des POP

La convention de Stockholm est un traité international qui a pour objectif de protéger la santé de la population et l’environnement des P.O.P, en interdisant certains produits polluants. Entrée en vigueur en 2004, 150 pays se sont engagés à réduire la pollution de l’environnement par les POP. La convention couvrait initialement 12 substances chimiques.

« Signé en 1998, le protocole Aarhus est un traité international qui interdit la fabrication et l’utilisation de  substances chimiques particulièrement polluantes en Europe, Amérique du Nord et Asie centrale. » [1]

Ces deux textes ont pour objectif de réduire, contrôler ou éliminer la course de ces P.O.P à travers le monde.

Le comité d’étude, composé de 31 spécialistes de l’évaluation ou de la gestion des substances chimiques, examine les propositions d’inscription de nouvelles substances chimiques.

Lors de l’inscription de nouvelles substances chimiques, les Parties doivent

  • Mettre en œuvre des mesures de contrôle pour chaque substance chimique,
  • Elaborer, mettre en œuvre des plans d’action concernant les substances chimiques produites non intentionnellement,
  • Dresser des inventaires des stocks de substances chimiques,
  • Examiner et actualiser le plan national de mise en œuvre,
  • Inclure les nouvelles substances chimiques dans les rapports et dans le programme d’évaluation de l’efficacité.

Les 12 premiers Polluants Organiques Persistants

Les différents P.O.P. sont classés selon trois annexes qui définissent les obligations d’usage des substances chimiques classées ci-après. L’annexe « A » demande aux Parties l’élimination de la production et de l’utilisation des substances chimiques. L’annexe « B » impose aux Parties la réduction de la production et de l’utilisation des substances chimiques. Enfin l’annexe « C » demande aux Parties la réduction des rejets non-intentionnels, la réduction continuelle du volume, voire lélimination des substances chimiques.

Les nouveaux P.O.P. inscrits dans la convention

En 2009 durant la conférence des Parties, les annexes A B et C ont été modifiées, 9 nouvelles substances chimiques ont été ajoutées.

Parmi les nouveaux P.O.P, le Chlordécone

Inscrit dans l’annexe A (qui demande aux Parties l’élimination de la production et de l’utilisation des substances chimiques), le Chlordécone (ou Képone®) est chimiquement apparenté au Mirex. Cette substance chimique est un composé synthétique chloré, utilisé dans la fabrication de produits phytosanitaires (pesticides).

Très persistant dans l’environnement, il présente un fort potentiel de bioaccumulation (assimilation par les êtres vivants) et de bioamplification (augmentation des concentrations d’une substance persistante dans les différents maillons de la chaîne alimentaire).

Le Chlordécone est classé comme potentiellement cancérigène pour les humains et est très toxique pour la biodiversité aquatique, mais des alternatives à ce produit existent et peuvent être mises en place pour un faible coût.

« Quelque 80 000 personnes habitent dans des zones où le sol est contaminé et 13 000 individus absorbent chaque jour, en mangeant des légumes qu’ils cultivent, une quantité de Chlordécone dépassant la valeur toxicologique de référence : 0,5 µg/kg/j.

Il faut aider la population à se préparer à vivre avec un problème qui n’est pas près de disparaître : la demi-vie du Chlordécone dans le sol est de six siècles !

Des rapports parlementaires l’on déjà pointé : le ministère de l’agriculture n’a pas correctement traité les signaux scientifiques sur les dangers de la pollution et de l’exposition du Chlordécone. Il y a eu un retard dans la prise de conscience et l’action » insiste William Dab, président du Conseil scientifique du Plan Chlordécone en Martinique et en Guadeloupe. [2]

Pour en savoir plus sur le Chlordécone, lisez notre synthèse sur les pesticides sur le site de l’ASEF.

Le mot du Dr Patrice Halimi, chirurgien-pédiatre et co-fondateur de l’ASEF

(Extrait tiré du livre « La Grande Détox », 2015)

L’histoire du Chlordécone, des dégâts à long terme

« L’histoire du Chlordécone est tristement révélatrice. Cet insecticide a été massivement utilisé entre 1972 et 1993 dans les Antilles Françaises pour lutter contre le charançon, un insecte qui ravageait les bananeraies. Dès les années 1970, des travaux scientifiques ont démontré les dangers de ce produit pour la santé humaine, ce qui a justifié son interdiction en 1976 aux Etats-Unis. En France, il a fallu attendre 1990… Et seulement en métropole !

Pour des raisons purement économiques et au mépris de la santé de la population,  le Chlordécone a encore été utilisé durant trois ans supplémentaires en Martinique et en Guadeloupe. Plus de vingt ans après son interdiction, les habitants paient cher l’inertie des pouvoirs publics, à l’époque. Car l’insecticide, persistant dans l’eau et les sols, contamine encore des denrées produites dans ces deux départements d’Outre-Mer. Classé « peut-être cancérogène » par l’OMS, le Chlordécone semble jouer un rôle dans l’apparition du cancer de la prostate. La Guadeloupe présente un taux d’incidence de ce cancer parmi les plus élevés du monde. Perturbateur endocrinien, l’insecticide est aussi suspecté d’augmenter le risque de prématurité. » [3]

Les Biphényles Polychlorés (PCB)

Classés comme Perturbateurs Endocriniens avérés et « cancérigènes certains », les PCB (ou Biphényles Polychlorés) ont été utilisés dès les années 1930 comme isolants thermiques pour les appareils électroniques. On les utilisait notamment comme additifs dans le papier, les agents d’étanchéité et les matières plastiques. Interdites depuis 1979, les substances qui composent les PCB persistent dans l’environnement et se bioaccumulent. Des effets sur la reproduction et la croissance, ainsi que des dommages du foie ont été observés sur les humains. Les PCB sont aussi très nocifs pour la faune et la flore aquatiques.

 

 

Bibliographie

 « Les POP, des substances à identifier pour pouvoir les éliminer », Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, octobre 2015

 « Convention de Stockholm sur les Polluants Organiques Persistants », Secrétariat de la Convention de Stockholm, août 2010

[1] Définition du protocole Aarhus : https://lc.cx/gnKu

[2] Article sur le Chlordécone : https://lc.cx/zDB

[3] « La Grande Détox », Patrice Halimi, édition Calmann-Lévy, 2015, page 115

 

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